Erodés (Installation, Terre, Ø 300 x 150 cm, Bois de la cloche – Villiers sur Orge, 1999)

Tas de cubes en terre, modelés sur place dans une friche, lieu délaissé, bois abandonné. Ce tas de cubes enchevêtrés est en attente d’une lente érosion, d’un retour à la planéité, un nivellement. Les formes géométriques sont confiées à un temps météorologique ou géologique, l’empreinte de l’homme étant destinée à s’évanouir. Cette forme érigée sur le fil entre solidité et fragilité, élévation et déréliction, attente d’une construction ou abandon, est une vanité, symbole de la fuite du temps, écoulement irréversible. Comment rendre compte d’un phénomène d’érosion invisible à l’œil nu, d’un écoulement du temps imperceptible ? Donner à voir le temps qui passe, ce qui s’efface et résiste au temps ? Plus le phénomène est lent et lointain, plus il faut l’impatienter. Cette précipitation, édification de la ruine rend visible cet éloignement temporel. Le temps de l’érosion pressé dans sa chute est fixé par une série d’instantanés, états successifs de la décomposition capturés d’un point fixe par la pellicule. Cet espace temporel conjugue temps explosif et coulé. Cette compression de l’espace et du temps accélérant un lent processus de dégradation est accompagnée d’une participation imprévue des visiteurs qui déplacent les cubes, réappropriation et réactivation d’un chantier public. L’installation s’expose à un effacement volontaire et involontaire.